Expédition Boy Bulok 2018 – Ousbékistan

29 Juillet au 20 aout 2018

Le projet 2018 avait pour but de réaliser la jonction entre deux cavités du massif du Schulbair: le gouffre mythique de Boy Bulok (1450m de dénivelé) découvert et exploré jusqu’à son terminus dans les années 80 et le gouffre de Vishnevskii exploré actuellement jusqu’à -750 m. Du fait des profondeurs et des différences d’altitudes des entrées (2650 m pour Boy-Bulok et 3500 m pour Vishnevskii ), la jonction aurait porté le dénivelé du système à 2150 m environ, soit le troisième gouffre le plus profond au monde !

L’expédition se composait de 24 participants, treize Russes du groupement CGC (Sud-Oural), huit Français et trois Suisses de l’association Continent 8.

Pendant trois semaines, nous avons poussé les explorations en nous concentrant sur 4 objectifs:

  • Remonter l’affluent de -560 m dans la rivière de Boy-Bulok. Cet affluent serait en effet une des arrivées possibles du gouffre de Veschnevkii
  • Poursuivre les explorations dans les amonts de Boy-Bulok (cote +250 m) pour tenter une sortie en falaise vers 3500 m d’altitude
  • Poursuivre les explorations au fond du gouffre de Vishnevskii (cote actuelle -750 m) en direction de Boy-Bulok
  • Poursuivre les explorations des affluents de la rivière de Vishnevskii à la cote -400 pour trouver éventuellement d’autres rivières qui se développeraient en direction de Boy-Bulok

Au final la jonction entre les deux gouffres n’a pas été établie, mais les résultats de l’expédition sont encourageants:

  • Le gouffre de Boy-Bulok a été entièrement rééquipé jusqu’à la côte de -500 m. En effet certains des équipements en place – pour ne pas dire tous – dataient des années 1980.
  • A Boy-Bulok, dans l’affluent de -560 m, les escalades ont buté sur des méandres impénétrables.
  • Dans la partie amont de Boy-Bulok, un bivouac de 10 jours et une centaine de tirs ont permis de remonter 300 à 400 m de méandres en direction de la falaise
  • Au fond de Vishnevskii , tous les passages ont été fouillés systématiquement lors d’un bivouac de cinq jours. Plus de 700 m de topographie ont été levés dans cette partie. L’exploration est en arrêt sur rien dans un affluent rive gauche qui part en direction de Boy-Bulok sur 300 à 400 m.
  • Au bivouac 1 de Vishnevskii (cote -400 m), deux équipes se sont succédés sur une période de deux fois cinq jours et ont pu progresser dans trois affluents. Ils totalisent environ 700 à 800 m de première.

Au total, nous avons réalisé 4,5 km de topographie dont 2 km de nouvelles galeries, principalement dans le gouffre de Veschnevkii.

Les gouffres de cette région sont particulièrement exigeants: longs, froids, hauts en altitude, étroits, marche d’approche importante, etc. La progression y est lente et difficile en raison du poids des sacs (8h pour atteindre le fond de Vishnevskii sans kits, 14h avec un kit à bout de bras!…) et des accès souvent délicats (l’entrée de Vishnevskii s’ouvre dans une falaise à pic de 300 m).

A ces conditions s’ajoutent aussi les difficultés géopolitiques et les trafics de stupéfiants. Entre la fin des années 1990 et la fin des années 2000, les autorisations d’exploration ont été suspendues du fait de la présence américaine qui utilisait le sud de l’Ouzbékistan pour mener les raids en Afghanistan.

Enfin, il faut aussi prendre en compte l’éloignement de la zone. Depuis Tashkent, il faut compter 12 h de transport jusqu’à Boysun (train ou bus), 4 h de camion à 6 roues motrices pour rejoindre Dehibolo et 7 h de marche d’approche pour accéder au camp de base à 3000 m d’altitude.

Par conséquent, peu de gens vont la-bas; et à l’exception d’un certain “Jérome Dupuis” qui serait venu sur le camp en 1994, nous sommes manifestement les seuls francophones à avoir mis les pieds sur le massif !

5 réflexions sur « Expédition Boy Bulok 2018 – Ousbékistan »

  1. superbe ! mais quels sont ces populations qui vivent là bas au pied de ses massifs arides et qui ont contribué à la réussite de cette expédition ?

    1. La légende veut que le premier spéléo de la zone soit un certain « Mustapha » – un berger du village de Dehibolo au pied du massif.
      Ce type avait commencé tout seul l’exploration de Boy-Bulok avec une lampe à pétrole dans les années 60 ou 70… Je ne sais pas exactement.
      Dans la suite de l’histoire, Mustapha, en explorant tranquilement le méandre a fait une chute mortelle dans un puits de 30 m – puits qui porte d’ailleurs son nom sur la topo: le « Mustapha pit ». Faut voir quand même que ce puits est loin de l’entrée – à près de 2h de progression.
      Dans les années 80, les Russes qui sont arrivés sur le massif ont été directement aiguillés sur Boy-Bulok par les bergers. Ils ont retrouvé Mustapha – en tout cas ce qu’il en restait – et ont mis ses ossements dans un kit-bag qu’ils ont ensuite rapporté à la famille.
      Et c’est finalement à ce moment qu’une collaboration se met en place entre les ouzbecks du village et les Russes.

  2. Une centaine de tirs…
    Avec quoi vous tirez ?
    Est ce qu’il existe des entrées sur le plateau en pente douce ? Entrées qui vont vers les 2 réseaux explorés ?

    1. Ciao,
      Avec de la poudre tout simplement… conditionnée directement sur place. Difficile de trouver des entrées sur le plateau. On pense que prés du camp de base, au fond du canyon on devrait pouvoir trouver des accès aux deux réseaux – mais il y a certainement un gros travail de désobstruction à envisager (éboulis à creuser, blocs à déplacer, etc.)

Répondre à Jean Philippe Philippe GRANDCOLAS Annuler la réponse

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *