Archives de catégorie : Expédition

Un prix international sur la protection des cavités décerné à une équipe de spéléologues français

L’équipe de Homini’karst, composée de spéléologues français membres de la FFS, a remporté le prix France Habe 2025 pour la protection du karst et des grottes, une distinction internationale délivrée par l’Union internationale de spéléologie (UIS) lors de son congrès au Brésil en juillet dernier.

L’équipe d’Homini’karst est composée de spéléologues français : Laurent Bruxelles, Véronique Olivier, Philippe Auriol, Bastien Chadelle, Gregory Dandurand, Kim Genuite et botswanais Oaitse Ledimo.

La grotte de Gcwihaba est située dans le nord-ouest du Botswana au milieu du désert du Kalahari. Elle constitue un laboratoire naturel unique où interagissent processus géologiques, biologiques et anthropiques. Préservée dans de petites buttes calcaires, elle comporte des brèches fossilifères – conglomérats d’ossements et de sédiments lithifiés – potentiellement porteuses des premiers restes d’hominines anciens de la région. D’où le nom de l’expédition : Homini’Karst. La perspective de découvrir des fossiles d’australopithecus ou paranthropus  alimente les recherches menées conjointement par les spéléologues, les géologues, les archéologues et les paléontologues qui collaborent pour une même quête.

Biocorrosion et dépôt de guano

Deux axes scientifiques structurent les travaux : l’étude des brèches fossilifères, en fouille depuis 2021, et la biocorrosion, processus par lequel les dépôts de guano de chauves-souris interagissent chimiquement avec les carbonates des dolomies. Cette biocorrosion, étudiée notamment par Laurent Bruxelles (CNRS), modifie profondément la morphologie interne de la cavité : formations de « bell holes », altération microscopique et macroscopique des parois, voire doublement de la section de certaines galeries. Les taux de dissolution mesurés, pouvant atteindre 0,65 mm/an, soulignent la dynamique du phénomène.

Gcwihaba cave, entrée nord avec une partie de l’équipe. Photo LBX

Les dépôts de guano, essentiels à la fois d’un point de vue écologique et géomorphologique, jouent également un rôle déterminant dans la conservation ou la disparition des vestiges archéologiques. Leur accumulation explique l’absence d’œuvres pariétales, tandis que leur analyse isotopique et palynologique permet de reconstituer le climat et les écosystèmes passés, révélant une archive environnementale unique à l’échelle du continent.

Les spéléologues contribuent à cette recherche en assurant l’accès sécurisé aux zones de fouille, en explorant les cavités pour identifier les brèches, et en prélevant les échantillons nécessaires aux datations et à l’analyse de la microfaune – éléments permettant de reconstruire les paléoenvironnements.

Cartographie 3D et protection UNESCO

Le site de Gcwihaba revêt également une dimension patrimoniale forte. Exploré dès les années 1950, cette cavité qui comporte deux entrées est désormais ouverte au tourisme avec un guide local et fait l’objet d’actions de médiatisation visant à promouvoir sa conservation. Les populations San, qui utilisent la grotte depuis des millénaires, perpétuent une relation culturelle et rituelle au lieu, notamment via des cérémonies à l’entrée nord, considérée comme sacrée. La cartographie 3D moderne de Gcwihaba cave contribue à la valorisation patrimoniale et scientifique du site.

Travail de cartographie de Kim Genuite.

Gcwihaba cave est devenue une « cavité école », accueillant chaque année le Gcwihaba Campus et hébergeant plusieurs thèses dédiées à la géomorphologie, à la paléoécologie et à la microfaune. Les collaborations régionales et internationales renforcent l’importance scientifique du lieu et montrent la nécessité d’impliquer des spéléologues dans la recherche souterraine.

Enfin, le Botswana porte un projet de classement UNESCO, appuyé par la valeur géologique, écologique, culturelle et scientifique du site. La compréhension du rôle des chauves-souris et de la biocorrosion constitue un élément central de cette démarche, intégrée à un futur programme européen.

Laurent Bruxelles devant un exemple de biocorrosion. Photo CBX

En juillet 2025, lors du congrès de l’UIS, c’est le photographe Philippe Crochet qui a reçu le prix au nom de l’équipe d’Homini’Karst, car il rentrait justement du Botswana après un travail de photographies pour la réalisation d’un livre coédité avec le museum national d’histoire naturelle de Gaborone.

Les rapports 2023 et 2024 des expéditions spéléologiques au Botswana seront bientôt disponibles sur le site de la Commission des relations et des expéditions internationales de la Fédération française de spéléologie.

Expédition spéléologique dans le rif marocain : l’inventaire de la faune cavernicole se poursuit

L’expédition franco-marocaine se nomme Talassemtane – Rif 2025 et elle s’est déroulée du 11 au 23 aout 2025. L’exploration se situe dans la province de Chaouene, Dorsale calcaire du Rif, massif du Lakraa-Tissouka

Depuis 2022 les découvertes se succèdent dans le Rif (Dorsale calcaire – Province de Chaouene). Les pompages pour l’irrigation ont permis de progresser dans le Kef Ansar Tinioune, qui atteint 2018 m de développement (-9, +31), le déboisement (toujours pour la culture du
cannabis) a permis à des spéléos de Chaouene de découvrir le Kef radâa (développement 4244 m, -17, +46).
Si l’on ajoute quelques cavités moins importantes, cela représente 5 840 topographiés, plus de 6 km explorés.

Une équipe pluridisciplinaire


Le premier siphon du Kef Bradâa a été franchi en 2024 (100m, -18), arrêt sur un S2 dont la plongée est prévue pour 2026. Un premier réseau supérieur a été exploré, cette cavité est loin d’être terminée.
Les expéditions ont réuni des équipes françaises (Spéléo Club de Blois, Spéléo Club de Touraine, Groupe Spéléologique Vulcains, individuels et marocaines : clubs de Chaouene, Marrakech, Casablanca, Taza), au total 15 spéléos français et 7 marocains.


Elles ont permis de poursuivre l’inventaire de la faune souterraine de la région grâce à la présence de biologistes : Sylvain LECIGNE (arachnologue), Soumia El MOUTAOUKIL (biologiste marocaine), Bernard LIPS et Josiane LIPS (membres du GEB).
Une nouvelle expédition est prévue en 2026.

Six cavités nouvelles

L’expédition avait pour but la reconnaissance de zones nouvelles ou peu explorées. Il n’a pas été possible de réaliser tous nos objectifs en raison des difficultés d’accès et des temps de parcours dus à l’état des pistes.

Néanmoins 6 cavités nouvelles ont été répertoriées et topographiées, pour un total de 362 m dans l’état actuel des reports.


A noter qu’une équipe régionale marocaine (Clubs de Chaouene et de Tetouan) est parvenue à faire l’exploration du Kef Toghobeit (-722) en totale autonomie début octobre 2025.

Expédition canyon sur l’île de Sao Tomé : cascades et sensations

14 membres de l’Association AERE se sont dirigés vers l’ile de Sao Tomé, dans le golfe de Guinée, dans le but d’y présenter une nouvelle activité, d’en équiper les cascades, et de former nos guides-fixeurs.
Olivier Courtois, Dominique Courtois, Gérald Drieux, Yvan Schirmer, Jean-Michel Eidenschenck, Floria Drieux, Benjamin Némard, Emmanuel Remund, Julie Boulbes, Sandra Turillon, Pascal Hestin, Sandra Hestin, Sabine Repecaud, Jean-Jacques Membrede.
Cette expédition a obtenu l’agrément de la Fédération Française de Spéléologie et l’aide de notre Comité Départemental Spéléologique d’Alsace. Plusieurs fabricants ou revendeurs de matériels ont également apporté leur contribution :

  • Le fabricant de matériel de canyoning, Tebylon
  • Le fabricant de sacs et sacoches, Bag Bâche
  • Le fabricant Alsafix
  • Le magasin de sport Sport Loisir Équipement, à Belfort
  • Le magasin Canyon Zone
  • L’entreprise alsacienne VOB
  • Le droniste Julien Kloss et son entreprise

    Sur place, nous avons été pris en charge par José Gonçalves, dès notre sortie de l’avion. Il s’agit de notre hébergeur et loueur de véhicules. Wilson Pires, l’un de nos deux guides, est aussi là.


Journalier

Vendredi 17 octobre : toute l’équipe se rend soit en voiture, soit en train, à l’aéroport de Francfort (Allemagne), d’où partira le vol vers Lisbonne (exception faite de deux membres qui partiront de Bâle).

Samedi 18 octobre : via Lisbonne, vol vers Sao Tomé. Départ de Francfort à 6 heures du matin et arrivée le même jour à 19h, heure locale. José nous emmène à notre hôtel et nous offre son pot d’accueil.

Dimanche 19 octobre : l’ensemble des membres part en reconnaissance avec nos guides, Brice et Wilson. Au volant de nos 4×4, nous découvrons plusieurs sites le long de la rivière Abade, les accès amont et aval, les difficultés des pistes défoncées et des sentiers abandonnés.

Lundi 20 octobre : deuxième jour de prospection, en équipe complète, cette fois-ci le long de la rivière Ouro, de ses affluents, de la rivière Gemeas, et de la rivière Manuel Jorge… Que ce soit à pied ou par drone, nous repérons nombre de sites à explorer.

Mardi 21 octobre : deux équipes se dirigent vers le rio Ouro pour y descendre deux des affluents repérés, tout en initiant nos deux guides. L’affluent C34 et C15, dénommés ainsi par la hauteur des deux cascades visibles de la route, puisque ni chemin, ni cours d’eau ne sont représentés sur les cartes !

Mercredi 22 octobre : une équipe se rend à Sao Nicolau, pour descendre un peu moins de deux kilomètres de la rivière Manuel Jorge, alors qu’une seconde équipe démarre plus en aval, pour découvrir elle aussi un peu moins de deux kilomètres de rivière, entre Igreja et Milagrosa. La descente de la cascade touristique de Sao Nicolau est pour notre guide un incroyable défi, qu’il réalise avec une fierté dans le regard d’une immense intensité !

Jeudi 23 octobre : les membres se regroupent pour équiper un affluent du rio Abade, l’affluent C20, puisqu’une nouvelle fois, aucune rivière ne figure sur la carte.

Vendredi 24 octobre : prospection vers Angolares, pour y recenser Angolares, Angular, Nazares, Contador… et nombre d’affluents plus ou moins intéressants.

Samedi 25 octobre : une équipe se dirige vers le rio Ouro amont, alors que la seconde part explorer Gemeas. Les accès sont toujours compliqués, même si pour Gemeas, nous atteignons le point souhaité sans aucune erreur d’itinéraire.

Dimanche 26 octobre : l’équipe au complet se dirige vers ce qui deviendra l’une des perles de l’ile en matière de canyonisme, engagé, inquiétant, très aquatique, mais de toute beauté, le canyon de Gruta Morsego, « la grotte des chauves-souris » !

Lundi 27 octobre : une équipe se rend à Angolares, et la seconde à Angular. Au bas de la première cascade d’Angolares, l’équipe 1 se fait surprendre par une crue l’obligeant à quitter le cours d’eau, alors que la seconde, à la fin de la partie verticale, subit une brusque montée des eaux, la rivière passant en moins d’une minute de 40 litres/seconde à plusieurs mètres cubes ! Une frayeur n’ayant pour conséquence heureusement qu’une perte de matériel !

Mardi 28 octobre : une partie de l’équipe se remet de ses émotions de la veille alors qu’une seconde se rend dans la palmeraie du sud du pays, pour tenter de trouver des accès à la zone souhaitée de bivouac pour le secteur de la rivière Umbugu. Un sentier est trouvé, cependant toutes les rivières et affluents étant en crue, nous renoncerons à ce projet de bivouac.

Mercredi 29 octobre : retour à Angolares, sous le soleil cette fois-ci. Peu avant la fin de nos deux heures de marche d’approche, la pluie arrive. De plus en plus forte, elle nous fait hésiter. La rivière est en crue et nous rebroussons chemin une nouvelle fois. Un vallon parallèle, dont
la rivière ne figure sur la carte, nous permet de poser quelques points et de descendre quelques cascades. En arrivant à l’altitude basse de la grande cascade d’Angolares, nous la rejoignons pour en descendre la suite, puisque les 3⁄4 du débit sont ici captés vers l’unique centrale hydro-électrique de l’ile. La fin de la journée est marquée par une inspection le long d’Angular pour tenter d’y retrouver deux sacs emportés par la crue.

Jeudi 30 octobre : journée tous ensemble à Gue Gue, un site en aval de la rivière Manuel Jorge. L’unique cascade offre une vue parfaite pour y réaliser quelques photos.

Vendredi 31 octobre : alors qu’une bonne partie de l’équipe s’offre une journée de tourisme bien méritée sur l’ile de Rolas, cinq irréductibles se dirigent pour la 4ème fois vers la cascade d’Angolares, croisant les doigts pour que les deux heures de route suivies des deux heures de marche ne soient pas une nouvelle fois faites en vain ! Le soleil nous accompagnera toute la journée ! Nous nous offrons le luxe de poursuivre par le bas de la rivière, en contournant la partie explorée il y a quelques jours. Une petite dizaine de cascades descendues et nous voici devant la porte de notre 4×4.

Samedi 1er novembre : préparation des paquetages pour un retour vers nos foyers, notre vol décollant vers 22 heures. Arrivée le dimanche 2 novembre à Francfort, puis cinq heures de route nous permettent d’être chez nous aux alentours de 21 heures.

15 descentes réalisées

En résumé, ce sont quinze descentes que nous avons pu réaliser, deux guides devenus autonomes si ce n’est dans l’équipement, dans leur descentes et progression sur corde, et surtout, un formidable tissu local qui nous permettra très certainement de revenir mieux préparés, pour une expédition plus ambitieuse !
Nous avons pu constater les difficultés liées à l’absence de carte fiable, où nombre de cours d’eau ne sont pas représentés, où ceux représentés ne sont pas forcément aux bons endroits, où les sentiers sont absents…
Les pistes peuvent être en très mauvais état, parfois on peut les descendre mais pas les remonter !!


Nous avons cartographié, via une application GPS, les itinéraires empruntés, en voiture ou à pied, ainsi que les cours d’eau.
En plus des sponsors et parrainages cités plus haut, l’équipe tient particulièrement à remercier tous nos contributeurs via la plateforme participative, Claude Roux, Myriam Virot, Nicole Bertin, Jean-Pierre Richard, Eric et Elisabeth Drieux, Lydie Drieux, Maëlle Hestin, Marina
Mannarelli, Katia Schutz, Régine Maier, Michel Spenle, Hélène Jakubowski, Hélène Biegel, Nadjib Belaribi, Ambroise-Marc Poudevigne, Françoise Mazard, Audrey Antoine , Lynda Vamparys, Patricia Burget, EZstelle Kieffer, Adélaïde Vendrame, Lionel Montagne, Valérie
Bollecker, Léa Rigard, Xavier Zimmermann, Thomas Janski, Auriane Mentele, Elodie Pierre, Evelyne Boulbes, Mathieu Belon, Charlotte Comparon, Nathalie Melee, Johanne Belon.
Ainsi que les entreprises de « Montagne Passion Itinérance » et « Aventure et Canyon » qui ont mis à disposition de l’expédition un important lot de matériel.

Expédition spéléologique au Botswana : une nouvelle grotte fossilifère explorée

L’expédition Hominins in Botswana : Karst research project s’est déroulé du 30 septembre au 21 octobre 2025. L’objectif premier de la mission est la recherche d’hominines anciens dans les karsts du Botswana. Une telle découverte montrerait que d’autres fragments du Berceau de l’humanité (origine du genre Homo) existent en Afrique et validerait l‘idée d’une origine panafricaine de notre genre. L’une des principales activités cette fois-ci était d’extraire la brèche décalcifiée de Bone cave afin de faire sécher le sédiment au soleil et permettre un tamisage plus facile et plus rapide.

Le deuxième objectif consistait à continuer les visites des cavités de Koanaka hills à la recherche de nouveaux gisement fossilifères et, en parallèle, de mieux comprendre la karstogenèse de ces massifs très peu connus.

Le troisième objectif a permis de sécuriser l’entrée de Bone caves, des blocs rocheux de grandes tailles menaçant de rouler sur une trémie instable, mettant en péril la poursuite de la mission.

Bastien à l’étayage de Bones cave revient avec des troncs d’acacia.

Cette mission a été très engagée physiquement avec des moyens humains importants mais insuffisants (19 personnes au total) et des véhicules défaillants.

Les membres de l’équipe :

Laurent Bruxelles : directeur de recherche au CNRS UMR 5608, géomorphologie et géoarchéologie TRACES – directeur du Centre International de Recherche SHARE CNRS-Wits -professeur honoraire de l’université du Wittwatersand à Johannesburg – spéléologue fédéré à la FFS

Gregory Dandurand : géoarchéologue et karstologue à l’INRAP Nouvelle Aquitaine et outre-mer – UMR 5608 TRACES – spéléologue fédéré à la FFS

Philippe Auriol : médecin spécialiste en milieu isolé, spéléologue fédéré à la FFS

Jean-Baptiste Fourvel : chercheur en paléontologie et taphonomie UMR 5608 TRACES à Toulouse

Bastien Chadelle : doctorant en géomorphologie UMR 5608 TRACES, spéléologue fédéré à la FFS

One Clays Tshukudu : paléontologue, spécialiste de la micro faune UMR 5608 TRACES à Toulouse – Doctorante à l’université Toulouse Jean Jaurès

Pierre Linchamps : paléontologue spécialiste de la microfaune, post-doctorant à l’université du Wittwatersand à Johannesburg – muséum national d’histoire naturelle France – Histoire naturelle de l’homme préhistorique en Afrique du Sud

Francis Duranthon : paléontologue spécialiste des mammifères fossiles et néogènes, CAGT, past-directeur des muséums de Toulouse métropole et directeur des musées de la ville de Toulouse.

Véronique Olivier : spéléologue fédérée à la FFS

Avec nous, l’équipe Botswanaise du musée de Gaborone : Oaitse Ledimo, Milton Tapela, Foster Motshola, Tsoholo Mopoto Et des volontaires du village de Xaï Xaï, trois femmes et trois hommes : Kandu Komutjiua, Neo Xixae, Thapelo Xixae (la maman de Neo), Philip Xaashee Xixae, Uritjiua Marenga, Tshao Xixae.

L’équipe est au complet et Philippe Auriol tient l’appareil photo. Photo PAU

Résultats

Pour permettre la réussite de la mission, les spéléologues ont mis en œuvre des techniques spécifiques comme l’installation de deux tyroliennes pour acheminer les sédiments du haut vers le bas de la colline, et l’utilisation d’éclateurs de roche pour fragmenter des blocs dangereux lors de la sécurisation de Bone cave.

La Tyrolienne 1 en action avec Francis à l’entrée de Bones cave. Photo VOL

Les extractions de deux brèches, jaune ou rouge, prélevées à des endroits différents de Bone cave ont permis de traiter (de tamiser et de conditionner pour l’étude) entre 8 à 10 tonnes de sédiments, révélant plusieurs milliers d’ossements dont des espèces jamais décrites à ce jour. Nous avons acheminé ainsi, grâce à une chaîne humaine, 608 seaux de l’intérieur de la colline (– 40 m) jusqu’à l’entrée de la cavité pour les redescendre grâce à deux tyroliennes, au pied de la colline (2 x 45 m) avant de les vider sur des bâches.

On peut dire que nous avons déplacé un morceau de la montagne. Les sédiments ont été entassés en 4 jours et leur tamisage effectué en 2,5 jours.

La visite de Fossil’s cave, une cavité découverte en 2016 par Oaitse Ledimo et une équipe de forage à la recherche de kimberlite (le minerai qui contient du diamant) a permis de remarquer la présence d’une brèche rose très prometteuse qui comporte de nombreux ossements dont une forte proportion d’oiseaux. Certains sont inféodés aux milieux lacustres. Un fragment de molaire, potentiellement d’hippopotame, est en cours d’identification.

Sortie de Fossil Cave. L’amarrage est la boule de remorquage du 4×4 au-dessus d’un tube de forage de 43 m. Ledimo, Véro ; Laurent, Philippe et Greg. Photo Oatse Ledimo

La mission a connu divers aléas avec un docteur malade plusieurs jours, des véhicules victimes d’avaries (suspension cassée, allumage défectueux, train arrière cassé), une luxation d’épaule réduite par le doc malade qu’on a tiré du lit, des serpents gitant souvent dans les cavités qu’il fallait attraper et éloigner pour travailler, une crise de panique d’un paléontologue au milieu d’un tube de forage de 43 m (et 70 cm de diamètre)… et un chaos organisationnel le dernier jour, qui a conduit à l’abandon fortuit de 2 membres de l’équipe en pleine brousse. Heureusement tout s’est toujours bien terminé.

Philippe, médecin,  est intervenu à diverses reprises sur la mission.

Quand c’était possible, Laurent attrapait les serpents pour les isoler dans une bouteille le temps de la fouille puis ils étaient relachés en surface.

Les pièges photographiques disposés dans Gcwihaba cave ont permis de constater que les deux léopards qui vivent dans la grotte (lire page 72 rapport BTW 2023) se sont accouplés.

Un pigeon bagué que nous avons appelé Joséphine s’est invité sur notre camp avancé le temps de notre séjour, prenant un 4×4 comme pigeonnier. Elle nous a tenue compagnie durant 15 jours, nous attendant quand nous rentrions au camp de base.

Nous avons baptisé ce pigeon de basse cour Joséphine . Elle a pris une voiture pour pigeonnier au coeur du Kalahari et ne nous a plus quitté. Nous attendant quand nous rentrions au camp de base.

Perspectives

Tous les indices convergent vers un environnement lacustre et la présence d’un paléo lac aux alentours de Koanaka hills et Gcwihaba hills il y a environ deux millions d’années. Ce paléo-environnement serait un écrin propice à la présence d’hominines.

La mission Hominins in Botswana continuera en mars 2026 afin de poursuivre les travaux en cours et consacrer du temps et des résultats à une équipe de télévision. Des études paléoenvironnementales et paléoclimatiques seront menée conjointement avec une équipe indienne et coréenne. Une collaboration avec les géologues travaillant dans le Delta de l’Okavango (lire page 58 rapport BTW 2024) commencera à cette occasion. Il s’agira de lier l’histoire du Delta avec l’histoire des grottes au travers du carottage de guano de chauve-souris. L’étude de cette carotte sera menée conjointement par une équipe de l’université du Witwatersrand (Johannesburg), un étudiant sud-africain et des étudiants de l’Université du Botswana.

Expédition biospéléologique au Maroc : focus sur les araignées

Cette expédition de biospéologie, du 14 au 26 mai 2025 fait suite à plusieurs stages de formation à la biologie souterraine (Tazekka, Agadir 2022), à une première expédition de biospéléologie en 2023 et à diverses autres missions ou expéditions. L’ensemble de ces actions a impliqué Soumia, qui a ainsi été accompagnée dans son travail de thèse sur la faune souterraine du Maroc, thèse qu’elle a soutenue avec succès en 2023 et qui vient d’obtenir un poste d’enseignante-chercheuse à Oujda dans le nord-est du Maroc.

Sylvain Lecigne est spécialiste des araignées et assume le travail de détermination des espèces récoltées, soit dans le domaine souterrain, soit sur des sites extérieurs. Il a participé à l’expédition « Biospéléologie au Maroc 2023 » ainsi qu’au camp d’exploration RIF 2024. Il a ainsi pu publier une note de 184 pages, décrivant notamment 24 nouvelles espèces d’araignées pour la Science et 51 autres espèces nouvelles pour le pays. Cette publication montre que la connaissance de la biodiversité des araignées reste très embryonnaire au Maroc. De nombreuses espèces restent à découvrir et pour d’autres espèces, seul un sexe est connu  et il faut donc trouver le second pour le décrire.

L’expédition s’est déroulée dans 4 zones karstiques

* Le massif du Tazekka, au sud de Taza, correspond à la partie nord du Moyen Atlas. Hébergés dans le gîte de Daya Chiker, nous y avons visité en 5 jours sur le terrain, 8 cavités, souvent de développement assez modeste (ghar Bouslama, ghar Izoura, mine de plomb de Bab Boudir, ghar Bab M’Tik, ghar Bouym 1, ghar Bouym 2, ghar Sidi M’Jber, grotte ou Trou de la Piste).

Amine Lasri, un spéléologue marocain nous a accompagné dans cette partie de l’expédition. Nous avons profité de ces visites pour lever des topographies ou faire des schémas assez précis de 5 cavités pour lesquelles n’existaient aucun plan ni schéma (ghar Bab M’Tik, ghar Bouym 1, ghar Bouym 2, ghar Sidi M’Jber, Trou de la Piste).

* Ghar el Kef est une cavité importante du Maroc mais très isolé, au nord de Taza, donc dans la chaîne de l’atlas tellien. Il s’agit d’une traversée d’environ un kilomètre, sans difficulté technique. Nous l’avons visité en inventoriant la faune le 21 mai en faisant un large crochet sur la route de Taza à Oujda. 

* Le massif des Béni Snassen, dernier massif marocain à l’est de l’atlas tellien. Hébergés chez Soumia à Oujda, nous y avons visité deux cavités (ghar Jleda, que nous avons partiellement topographié, et Ifri Ntafaghi).

* Enfin, un archéologue de l’université d’Oujda nous a proposé de visiter une cavité d’intérêt archéologique, ghar Guenfouda, à une trentaine de kilomètres au sud d’Oujda. Cette cavité, très sèche, s’est révélée pauvre en faune mais se situe dans une zone non citée dans l’inventaire des cavités marocaines et qui est probablement riche d’autres cavités.

12 cavités inventoriées

Ce sont en définitive 12 cavités qui ont été inventoriées sans compter une petite cavité trouvée en bord de route dont nous avons simplement fait un schéma.

Dans ces quatre zones, le but principal était la recherche d’araignées, qui seront étudiées par Sylvain, mais également de l’ensemble de la faune souterraine (essentiellement étudiée par Soumia, mise à part les coléoptères pour lesquels j’essayerai de trouver des spécialistes en France).

Tout comme en 2023, nous avons également recherché des araignées sur une douzaine de sites extérieurs. Nul doute que cette expédition permettra encore de mettre en évidence de nouvelles espèces d’araignées et de toute manière de fournir des informations sur la répartition, la phénologie et l’écologie des diverses espèces échantillonnées.

L’équipe

Participants fédérés à la FFS : Bernard Lips, Josiane Lips, Jean-Philippe Dégletagne

Autres participants : Sylvain Lecigne (spécialiste des araignées) et Soumia Moutaouakil (enseignante – chercheuse marocaine en biospéologie), Mohammed Amine Lasri (spéléologue marocain)

Expédition spéléologique en Papouasie : documenter l’occupation ancienne des grottes

L’expédition spéléologique et archéologique conduite en Papouasie occidentale par l’association Regard sur l’Aventure, l’université de Griffith et le BRIN s’inscrit dans une démarche  visant à documenter, analyser et étudier un environnement souterrain encore largement inexploré et les traits de cote de l’ile de Misool.

Recherche sur les sociétés préhistoriques d’Asie

Située dans une région karstique dense et difficile d’accès, cette mission a pour objectif principal l’exploration de réseaux de grottes potentiellement riches en vestiges archéologiques et en données souterraines. En combinant des prospections sur la côte et dans le karst, des relevés topographiques et des analyses des dépôts, gravures et peintures anthropiques, l’expédition cherche à mieux comprendre les modalités d’occupation humaine passée dans une région ou ces voyageurs sont certainement venus. Par ailleurs, l’expédition ambitionne de contribuer à la constitution d’une base de données archéologique de la région de la Papouasie occidentale,  représentée dans la littérature scientifique. Cette initiative, conduite en collaboration avec des partenaires institutionnels et des chercheurs spécialisés en archéologie, géomorphologie et spéléologie, se veut à la fois exploratoire et contributive à la recherche sur les sociétés préhistoriques d’Asie du Sud-Est insulaire. Notre approche adoptée repose sur une articulation étroite entre observation de terrain, relevés techniques et analyses ou datation.

Composition de l’équipe 

Les archéologues australiens et indonésiens : L’équipe de chercheurs australiens et indonésiens utilise les nouveautés dans la science moderne pour retracer les chemins de ces premiers voyageurs marins afin de révéler de nouvelles perspectives sur la façon dont l’histoire humaine en Australie a commencé. Les connaissances générées par cette recherche profiteront aux chercheurs de deux manières. Tout d’abord, ce projet permettra de mieux faire connaître et reconnaître au sein de la société australienne le lien historique profondément ancien entre les peuples autochtones d’Australie et leur voisin du nord le plus important : l’Indonésie.

 Les spéléologues français : Reconnus pour leur maîtrise des environnements souterrains complexes et des expéditions, ils apportent leurs compétences techniques en exploration et en sécurité dans des zones difficiles d’accès. 

Balmier Franck, Maistre Guilhem, Courtois Olivier, Lucie Courtes, Geneau Anthony, Aubé Thierry, Maiffret Stéphane, Teulle julien, Yann Auffret, Luc Henri Fage, Fromento Bruno, Aubert Maxime, Adhi Agus Oktavania, Ambu, Zub’air Masud.

La Nouvelle-Guinée

Divisée en deux parties de superficies équivalentes entre la Papouasie occidentale intégrée à l’Indonésie (à l’ouest) et la Papouasie Nouvelle-Guinée indépendante (à l’est), la Nouvelle-Guinée est la deuxième plus grande île du monde (après le Groenland). Elle mesure environ 2 400 km de long et 650 km de large à son point le plus large, avec une superficie d’environ 800 000 km². Le terrain varie de la forêt tropicale de plaine aux hautes terres fertiles et à une colonne vertébrale montagneuse accidentée ; son climat est tropical.

Les sites d’explorations

L’ile de Misool dans les Raja Ampat. Un voyage dans cet archipel de quatre iles ou l’érosion galopante du karst n’a pas permis de découvrir les réseaux rêvés. Des gravures et des peintures ont été observées mais les datations n’ont pas été possibles.

Le karst d’Ayamaru : zone de Klabra

Une forêt dense, des accès compliqués et peu de temps ont eu raison d notre témérité. Une grotte aux gravures a été répertoriée dans le canyon de la rivière klabra.

La zone de Klamono : des découvertes et observations sur ce secteur avec des gravures rupestres et un réseau souterrain entraperçu. D’autre doline  sont situées plus à l’est mais les problèmes de santé et la fin de la mission pour une grande partie de l’équipe ne nous a pas permis d’aller voir ces effondrements.

Dans la continuité du projet de recherche Premiers voyages : Retracer les premiers mouvements de personnes, d’art et de culture sur la route du nord vers l’Australie et la Nouvelle guinée, nous planifions des expéditions sur d’autres secteurs de l’Indonésie.

Expédition spéléologique au Costa Rica : des grottes et des chauves-souris zig-zag

Quand on entend parler du Costa Rica on pense aux volcans plutôt qu’à la spéléo.

Pourtant, bien que de taille modeste, le Costa Rica regorgent de petits karsts variés – dont nous avons pu parcourir une partie des deux plus grands grâce au club spéléo Anthros, bien actif sur son territoire.

De retour d’un mois passé au pays des paresseux, nous voilà riche d’une expérience spéléologique faunistiquement surprenante. J’aime notre discipline qui, par notre objectif spéléologique, sait nous faire vivre des moments inattendus.

Equipe internationale pour explorer la perte de l’Higuera, près du volcan Arenal.

Les expés sont aussi rares que les karsts du pays. Bernard Abdilla est le correspondant de la CREI pour le Costa Rica et nous recommande quelques contacts sur place.

Lors de notre séjour nous avons la chance de faire la rencontre avec la spéléologue et biologiste Bulgare Stanimira Deleva qui nous a naturellement proposé de l’accompagner pour faire ses suivis de faune troglobie.

Le club speleo Anthros nous accompagne dans certains réseaux. Il n’y a pas beaucoup de verticale et nous n’avions pas beaucoupde matériel pour descendre.

Toute nos aventures sont a retrouver ici :

https://www.exploraddiction.com/single-post/sp%C3%A9l%C3%A9ologie-au-costa-rica-des-grottes-aux-chauves-souris-tropicales

Anaïs Boulay

Expédition spéléologique au Laos : 8900 mètres de topographie

L’expédition, organisée par l’association Explo-Laos et parrainée par la Fédération Française de Spéléologie, s’est déroulée du 27 février au 17 mars 2025 dans le secteur de Phou Pha Marn, à l’ouest du massif karstique de la province de Khammouane, suite à une reconnaissance effectuée en 2024 et en collaboration avec l’agence Green Discovery concessionnaire de la zone explorée. Plusieurs belles cavités existent sur ce secteur, partiellement visitées par les guides locaux notamment dans le but de développer le tourisme sportif à partir du site de Rock Viewpoint. Notre objectif était d’en poursuivre l’exploration et lever les topographies.

Tham Pong avec son puits d’entrée de 90 m

  • Tham Nanglong est une traversée avec belle rivière souterraine qui a livré 2945 m de galeries avec découverte de nombreux passages nouveaux
  • Tham Pong, magnifique gouffre avec P 90 dès l’entrée, a été topographié sur 525 m pour – 185 de profondeur
  • Tham Lom est formé d’une série de puits se terminant à -104 m sur un méandre ventilé mais impénétrable
  • Tham Kathoung, que nous avions explorée en 2013, a été prolongée de 922 m portant son développement à 4312 m
  • Tham Kouan Tung, particulièrement difficile d’accès au milieu des tsingys, a permis d’explorer 2942 m de conduits avec rivière souterraine creusée en partie sur une faille. Malgré de nombreuses escalades, aucune autre sortie n’a été pour l’instant découverte malgré le net courant d’air qui parcourt la cavité.
  • Tham Tonmay Khouay, large ouverture repérée en milieu de falaise, est une large grotte fossile topographiée sur 866 m. 
  • Tham Nam Ock est une large résurgence active en période de mousson dont le développement est de 555 m

L’expédition ramène donc 8900 m de topographie.

Par ailleurs, des prélèvements biospéléologiques ont été effectués dans chaque cavité.

Nous remercions notre ami Terry Bolger, MM Thongkhoon Sayalath et M. Olaxai.Saisouphanh de Green Discovery, ainsi que nos guides et chauffeurs.

Participants à K25

Claude Antoine-Régnier (Spéléo Club du Cern- SC Cern), Alexis Augustin (Leize Mendi), Lucie Esclavard (Groupe spéléologique, scientifique et sportif- G3S), Éric Kammenthaler (Leize Mendi), Bernard Lips (Groupe Spéléo Vulcain), Josiane Lips (GS Vulcain), Pascal Orchamps (Spéléo-Groupe de la Tronche-FL), Jean-Michel Ostermann (G3S), Virginie Pouyade (SC Cern), Serge Planès (Leize Mendi).

Expédition spéléologique aux Philippines : le gouffre le plus profond du pays !

Lorsque l’équipe arrive le 15 mars, Gilles vient de terminer une semaine de repérage sur la zone à explorer dans le karst de Samar en compagnie de Joni Bonifacio, spéléologue local qui nous accompagne depuis 2005 dans chacune de nos aventures. Ils ont découvert plusieurs cavités.

Nos neuf premiers jours d’exploration ont été fructueux malgré une météo pourrie.

« Nous avons dû acheter de la corde sur place »

Nous avons visité quelques petites grottes mais aussi deux cavités majeures de la zone, aux extrêmes Amont (Mama Cave) et Aval ( Cahangyapan Cave) de la dépression. Nous sommes arrêtés par des puits dans les deux cavités. Nous avons déjà utilisé toutes nos cordes. Pour continuer, nous avons dû trouver et acheter sur place (à Tacloban = 8 heures de van aller-retour) 200 mètres de corde supplémentaires.

14 jours plus tard, c’est déjà la fin du camp.

Le karsts de Samar a-t-il tenu ses promesses ?Avons-nous réussi à explorer Mama cave ?Avons-nous dépassé la profondeur de 285 m ? 

Oui ! Oui ! Et oui !

-358 m à Mama Cave

L’exploration de Mama Cave nous a amené jusqu’à la profondeur de -358 m, explosant ainsi le précédent record de profondeur des Philippines(-285m sur l’île de Palawan). Nous avons dû utiliser jusqu’à notre dernier mètre de corde, notre dernier bout de dyneema, notre dernier mousquetons et notre dernier ampère de puissance dans la batterie du perforateur. En deux séances, totalisant 22 heures d’exploration (sans compter le desequipement), nous avons équipé hors crue de nombreux puits pour éviter les cascades omniprésentes.Dans une seconde cavité, nous sommes descendus jusqu’à -131m. Toujours dans une cavité de type alpin avec beaucoup d’eau qui complique l’équipement. C’est encore plus gros que Mama Cave. Arrêt sur puits ! 

Le secteur est très prometteur. Les entrées de plusieurs autre cavités similaires ont été entrevues également sans pouvoir être explorées.

Un secteur très prometteur

Ça veut dire que pendant deux ans, on va rêver de Matuguinao, sa forêt et ses gouffres magnifiques.

P… ! Deux ans ! Ça va être long… rendez-vous en 2027.

Expédition spéléologique internationale « Nord-Pérou » août-octobre 2024

Comme chaque année depuis 2003, une nouvelle expédition est organisée par le tandem franco-péruvien GSBM-ECA (Groupe Spéléo Bagnols Marcoule / Espeleo Club Andino) sur plusieurs secteurs du versant amazonien des Andes du Nord du Pérou. L’expédition 2024, qui se déroule d’août à octobre, rassemble 39 spéléologues originaires de 8 pays (Allemagne, Autriche, Equateur, France, Irlande, Pays-Bas, Pérou, Royaume-Uni).

Tragadero del Ojo Derecho de Lorenzo et le premier camp à Granada. Photo Jean-Yves Bigot

La France aligne le plus gros contingent avec 13 participants dont 11 spéléos fédérés FFS issus de 4 clubs de la région Occitanie (GSBM Bagnols-sur-Cèze : Christian Klein, Florian Richard, Jean-Denis Klein, Jean-Loup Guyot, Jean-Yves Bigot, Pierre Bevengut, Raphael Gueit, Thibaud Duchateau ; SCSP Alès : Bastien Walter ; SCVV Nîmes : Adeline Ferrandez ; SRSASR Sorèze : Julien Jeannin). Arrivé à Lima, Patrice Baby (SCHS Tarascon-sur-Ariège) a dû interrompre sa participation à l’expédition pour raison de santé.

Tragadero Olvidado à Soloco. Photo Jean-Loup Guyot

Découverte de la perte du col de l’arche

L’expédition débute le 12 août sur les hauts plateaux (3500 m d’altitude) qui dominent le village de Granada, au Nord-Est de Chachapoyas, la capitale de la région Amazonas. Cette première partie de l’expédition est pilotée par Peter Talling (UK) et rassemble tous les participants anglo-saxons, 2 français et 1 péruvien. Un premier groupe installe son camp à proximité des deux pertes de Lorenzo, découvertes en 2023 et qui sont explorées jusqu’à -265 et -275 m. Un deuxième groupe s’installe à proximité du Tragadero de la Soledad (Perte de la Solitude) découvert en 2022 et exploré sur 2200 m en 2023. Cette année, le développement passe à 4187 m (-323 m) et la perte devient la plus longue cavité du Pérou… De très nombreuses cavités de moindre importance sont explorées sur le massif. En fin de partie, deux autres français rejoignent ce deuxième groupe alors que l’équipe anglo-saxonne se retire. Cette équipe franco-péruvienne réduite découvre la perte du col de l’arche (Tragadero de Abra del Arco), avec un P170 et arrêt sur rien vers -200 m. Bilan de cette première partie de l’expédition : une soixantaine de cavités explorées, 3598 m de galeries topographiées.

Dans le Tragadero Olvidado à Soloco, une magnifique céramique de facture « chachapoya » est découverte. Photo Jean-Loup Guyot

Une céramique de facture « chachapoya »

Le gros de l’équipe franco-péruvienne se retrouve à Soloco, à l’Est de Chachapoyas, le 6 septembre alors que 3 français et 1 péruvien terminent l’explorations du massif de Granada. C’est depuis ce village de Soloco où nous sommes logés chez nos amis de la famille Rojas, que nous allons reprendre les explorations du massif situé plus au Sud, entre 2800 et 3000 m d’altitude. Les explorations débutent sur le secteur de Toclón découvert quelques années plus tôt. Dans la perte oubliée (Tragadero Olvidado) découverte et partiellement explorée en 2023 (arrêt par crue), le fond est atteint à -185 m pour un développement de 1331 m. Dans un réseau fossile proche de l’entrée, une magnifique céramique de facture « chachapoya » est découverte. A proximité, l’exploration de la perte de Toclón 5 donne accès à un beau collecteur qui rejoint à l’aval Toclón 3-4 exploré en 2002, le système de Toclón développe maintenant 2323 m. La petite équipe de Granada rejoint le groupe de Soloco, et tous ensemble, nous partons installer un camp avancé sous le porche de Santa Maria, au Sud de Soloco. La perte de Santa Maria, découverte en 2003 et partiellement reconnue en 2023 est explorée jusqu’à une grande salle terminale à -207 m pour 1244 m de développement. A proximité, la perte de Parjugsha Arriba découverte et partiellement explorée en 2005 est, elle aussi, revisitée. La nouvelle topographie annonce 836 m pour -221 m dans cette cavité qui se termine également par d’immenses salles. Bilan des explorations à Soloco : 9 cavités explorées, 4667 m de galeries topographiées.

Cueva de Valle Andino. photo Christian Klein

Formation aux techniques de base en spéléo secours

Le 30 septembre, le groupe se sépare en deux. Une équipe part s’installer à la Cueva de Palestina, dans l’Alto-Mayo (région de San Martin), en forêt tropicale humide (800 m d’altitude). Une formation aux techniques de base en spéléo secours est organisée pour les guides de la grotte et les pompiers de la ville voisine de Nueva Cajamarca. Une dizaine de cavités sont visitées et explorées à proximité (230 m topographiés). La seconde équipe part effectuer une mission de collecte d’échantillons pour l’IRD sur les rios Marañón à Borja et Huallaga à Chazuta. En cours de route, une incursion rapide dans une vallée récemment colonisée (front pionnier, 1700 m d’altitude) permet d’explorer et de topographier partiellement la grotte de Valle Andino sur 1521 m.