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Expédition spéléologique au Botswana : une nouvelle grotte fossilifère explorée

L’expédition Hominins in Botswana : Karst research project s’est déroulé du 30 septembre au 21 octobre 2025. L’objectif premier de la mission est la recherche d’hominines anciens dans les karsts du Botswana. Une telle découverte montrerait que d’autres fragments du Berceau de l’humanité (origine du genre Homo) existent en Afrique et validerait l‘idée d’une origine panafricaine de notre genre. L’une des principales activités cette fois-ci était d’extraire la brèche décalcifiée de Bone cave afin de faire sécher le sédiment au soleil et permettre un tamisage plus facile et plus rapide.

Le deuxième objectif consistait à continuer les visites des cavités de Koanaka hills à la recherche de nouveaux gisement fossilifères et, en parallèle, de mieux comprendre la karstogenèse de ces massifs très peu connus.

Le troisième objectif a permis de sécuriser l’entrée de Bone caves, des blocs rocheux de grandes tailles menaçant de rouler sur une trémie instable, mettant en péril la poursuite de la mission.

Bastien à l’étayage de Bones cave revient avec des troncs d’acacia.

Cette mission a été très engagée physiquement avec des moyens humains importants mais insuffisants (19 personnes au total) et des véhicules défaillants.

Les membres de l’équipe :

Laurent Bruxelles : directeur de recherche au CNRS UMR 5608, géomorphologie et géoarchéologie TRACES – directeur du Centre International de Recherche SHARE CNRS-Wits -professeur honoraire de l’université du Wittwatersand à Johannesburg – spéléologue fédéré à la FFS

Gregory Dandurand : géoarchéologue et karstologue à l’INRAP Nouvelle Aquitaine et outre-mer – UMR 5608 TRACES – spéléologue fédéré à la FFS

Philippe Auriol : médecin spécialiste en milieu isolé, spéléologue fédéré à la FFS

Jean-Baptiste Fourvel : chercheur en paléontologie et taphonomie UMR 5608 TRACES à ToulouseBastien Chadelle : doctorant en géomorphologie UMR 5608 TRACES, spéléologue fédéré à la FFS

One Clays Tshukudu : paléontologue, spécialiste de la micro faune UMR 5608 TRACES à Toulouse – Doctorante à l’université Toulouse Jean Jaurès

Pierre Linchamps : paléontologue spécialiste de la microfaune, post-doctorant à l’université du Wittwatersand à Johannesburg – muséum national d’histoire naturelle France – Histoire naturelle de l’homme préhistorique en Afrique du Sud

Francis Duranthon : paléontologue spécialiste des mammifères fossiles et néogènes, CAGT, past-directeur des muséums de Toulouse métropole et directeur des musées de la ville de Toulouse.

Véronique Olivier : spéléologue fédérée à la FFS

Avec nous, l’équipe Botswanaise du musée de Gaborone : Oaitse Ledimo, Milton Tapela, Foster Motshola, Tsoholo Mopoto Et des volontaires du village de Xaï Xaï, trois femmes et trois hommes : Kandu Komutjiua, Neo Xixae, Thapelo Xixae (la maman de Neo), Philip Xaashee Xixae, Uritjiua Marenga, Tshao Xixae.

L’équipe est au complet et Philippe Auriol tient l’appareil photo. Photo PAU

Résultats

Pour permettre la réussite de la mission, les spéléologues ont mis en œuvre des techniques spécifiques comme l’installation de deux tyroliennes pour acheminer les sédiments du haut vers le bas de la colline, et l’utilisation d’éclateurs de roche pour fragmenter des blocs dangereux lors de la sécurisation de Bone cave.

La Tyrolienne 1 en action avec Francis à l’entrée de Bones cave. Photo VOL

Les extractions de deux brèches, jaune ou rouge, prélevées à des endroits différents de Bone cave ont permis de traiter (de tamiser et de conditionner pour l’étude) entre 8 à 10 tonnes de sédiments, révélant plusieurs milliers d’ossements dont des espèces jamais décrites à ce jour. Nous avons acheminé ainsi, grâce à une chaîne humaine, 608 seaux de l’intérieur de la colline (– 40 m) jusqu’à l’entrée de la cavité pour les redescendre grâce à deux tyroliennes, au pied de la colline (2 x 45 m) avant de les vider sur des bâches.

On peut dire que nous avons déplacé un morceau de la montagne. Les sédiments ont été entassés en 4 jours et leur tamisage effectué en 2,5 jours.

La visite de Fossil’s cave, une cavité découverte en 2016 par Oaitse Ledimo et une équipe de forage à la recherche de kimberlite (le minerai qui contient du diamant) a permis de remarquer la présence d’une brèche rose très prometteuse qui comporte de nombreux ossements dont une forte proportion d’oiseaux. Certains sont inféodés aux milieux lacustres. Un fragment de molaire, potentiellement d’hippopotame, est en cours d’identification.

Sortie de Fossil Cave. L’amarrage est la boule de remorquage du 4×4 au-dessus d’un tube de forage de 43 m. Ledimo, Véro ; Laurent, Philippe et Greg. Photo Oatse Ledimo

La mission a connu divers aléas avec un docteur malade plusieurs jours, des véhicules victimes d’avaries (suspension cassée, allumage défectueux, train arrière cassé), une luxation d’épaule réduite par le doc malade qu’on a tiré du lit, des serpents gitant souvent dans les cavités qu’il fallait attraper et éloigner pour travailler, une crise de panique d’un paléontologue au milieu d’un tube de forage de 43 m (et 70 cm de diamètre)… et un chaos organisationnel le dernier jour, qui a conduit à l’abandon fortuit de 2 membres de l’équipe en pleine brousse. Heureusement tout s’est toujours bien terminé.

Philippe, médecin,  est intervenu à diverses reprises sur la mission.

Quand c’était possible, Laurent attrapait les serpents pour les isoler dans une bouteille le temps de la fouille puis ils étaient relachés en surface.

Les pièges photographiques disposés dans Gcwihaba cave ont permis de constater que les deux léopards qui vivent dans la grotte (lire page 72 rapport BTW 2023) se sont accouplés.

Un pigeon bagué que nous avons appelé Joséphine s’est invité sur notre camp avancé le temps de notre séjour, prenant un 4×4 comme pigeonnier. Elle nous a tenue compagnie durant 15 jours, nous attendant quand nous rentrions au camp de base.

Nous avons baptisé ce pigeon de basse cour Joséphine . Elle a pris une voiture pour pigeonnier au coeur du Kalahari et ne nous a plus quitté. Nous attendant quand nous rentrions au camp de base.

Perspectives

Tous les indices convergent vers un environnement lacustre et la présence d’un paléo lac aux alentours de Koanaka hills et Gcwihaba hills il y a environ deux millions d’années. Ce paléo-environnement serait un écrin propice à la présence d’hominines.

La mission Hominins in Botswana continuera en mars 2026 afin de poursuivre les travaux en cours et consacrer du temps et des résultats à une équipe de télévision. Des études paléoenvironnementales et paléoclimatiques seront menée conjointement avec une équipe indienne et coréenne. Une collaboration avec les géologues travaillant dans le Delta de l’Okavango (lire page 58 rapport BTW 2024) commencera à cette occasion. Il s’agira de lier l’histoire du Delta avec l’histoire des grottes au travers du carottage de guano de chauve-souris. L’étude de cette carotte sera menée conjointement par une équipe de l’université du Witwatersrand (Johannesburg), un étudiant sud-africain et des étudiants de l’Université du Botswana.

Expédition archéologique et spéléologique au Botswana Homini-Karst du 19 novembre au 14 décembre 2024

Prospection dans le bush

L’objectif de la mission Homini-Karst conduite par Laurent Bruxelles, est de documenter la présence d’hominines il y a plusieurs millions d’années, dans la région d’Afrique australe, afin de faire le lien entre Afrique de l’Est et l’Afrique du Sud où la quasi-totalité des vestiges ont été découverts. Il s’agit d’explorer des grottes très anciennes, des avens pièges, et de continuer particulièrement à étudier la brèche, un remplissage karstique cimenté par la calcite qui comporte des fossiles. Dans cette brèche, l’équipe de Homini-Karst recherche des fossiles de micro et macrofaune et des vestiges d’hominines. Pour mener à bien cette mission du CNRS, une équipe pluridisciplinaire de 12 chercheurs, spéléologues géoarchéologues et paléontologues est constituée, dont quatre licenciés à la FFS, (Laurent Bruxelles, Gregory Dandurand, Philippe Auriol, Véronique Olivier) a été réunie, avec la collaboration d’une équipe d’une dizaine d’agents du Musée national du Botswana.

Gcwihaba nord

La formation des grottes par fantômisation et biocorrosion est également le sujet d’étude de Laurent et Gregory, qu’ils continuent de documenter. Une attention particulière a été portée sur l’étude des paysages et l’environnement autour des cavités, avec Bastien Chadelle, doctorant de Laurent, afin de mieux comprendre le fonctionnement de l’écosystème, les échanges avec la surface.
Un congrès de deux jours dans la ville de Maun a permis de présenter les résultats préliminaires et de tisser des liens solides avec les scientifiques d’Afrique australe, notamment de Zambie, du Zimbabwe, d’Afrique du sud et du Mozambique. Le congrès s’est achevé avec la visite de l’ambassadeur de France au Botswana et sa rencontre avec la première secrétaire du ministère de l’environnement et du tourisme botswanais.

Waxhou nord et ses parois de sable

L’expédition s’est déroulée dans le nord-ouest du pays dans le désert du Kalahari, autour des collines de Gcwihaba et de Koanaka. Le séjour se déroule en 4×4 aménagés avec des tentes sur le toit, afin de garder de la mobilité entre les différentes zones d’étude, cuisine de campagne et douche solaire sont notre quotidien. Le masque FFP3 sur le visage est requis dans les cavités comportant des colonies de chauves-souris. La température est de 25 degrés sous terre jusque 28 degrés. La mission s’est déroulée après une année de sécheresse et des records de température : 46 °C, le jour le plus chaud de l’histoire du Botswana. Contrairement à l’année précédente, il n’y a pas eu de pluie.

Philippe pénètre dans Wadoum

La mission a produit dix fois plus de résultats que celle de 2023

Paléontologie : Jean-Baptiste Fourvel le paléofauniste a continué de documenter la présence des léopards dans la grotte de Gcwihaba. Apparemment il y a deux ados en plus du père et de la mère. Pierre Linchamps microfauniste et Raphaël Hanon taphomomiste ont fouillé, sur les indications de Laurent Bruxelles de la brèche fossilifère décalcifiée à Bones cave. Elle s’apparente à celle de Sterkfontein en Afrique du Sud par exemple. Sa texture meuble permet de réaliser un tri par tamisage, ce qui permet de traiter un volume beaucoup plus important de sédiments par rapport au traitement de la brèche dure à l’acide comme l’an dernier. Amel et Jacques Jaillet de l’institut des déserts et des steppes (les gentils séniors de notre équipe) ont activement participé aux opérations de tri des ossements.
Bones cave est THE cavité qui fera le succès, à terme, de la mission. Les sédiments qu’elle contient ont le bon âge (entre 2 et 3 millions d’années) et elle recèle encore une grosse quantité de sédiments fossilifères. Parmi les fossiles retrouvés dans la brèche, les paléontologues ont retrouvé des os de poissons, mais aussi d’un théropithèque, un primate disparu il y a 2 millions d’années.

Découverte du babouin momifié
Microfaune prise dans la brèche

Spéléologie : Laurent Bruxelles, Véronique Olivier et Philippe Auriol ont visité plusieurs cavités pour étayer le mode de formation des grottes, des relevés stratigraphiques ont été dressés. La visite de Waxhou Sud a permis la découverte d’un babouin momifié en bas d’un aven piège, à – 50 m au pied d’un talus de sédiments. Il a été scanné dans sa position initiale, la même que Little foot, l’australopithèque découvert en 1997 à Sterkfontein. Le babouin a été sorti de la cavité en duo par temps bien sec pour qu’il n’y ait pas de reprise de pourriture à la sortie du gouffre. Philippe a levé le corps et Véro a assuré son transport. La momie a été présentée sur le campus éphémère de la mission avant de partir pour être exposé au musée d’histoire naturelle de Gaborone et ainsi documenter l’intérêt des avens pièges dans la recherche des fossiles.

Dans Wadoum les racines de figuier brise roche transforment la cavité en jungle pétrifié

Communauté scientifique et coopération : Les 20 jours d’expédition sur le terrain se sont déroulés avec le soutien de 10 fouilleurs, agents du musée de Gaborone. Un congrès de restitution des travaux en cours en Afrique australe a permis la présentation des premiers résultats et la structuration d’un réseau scientifique sur les paléosciences à l’échelle de l’Afrique australe. L’occasion de faire connaissance avec des chercheurs qui pourront apporter leur regard, par exemple sur la recherche d’objets lithiques.

Regard sur les léopards dans la caméra trap

Perspectives 2025

La prochaine expédition en 2025 permettra de continuer la fouille de Bones caves sur les niveaux de brèche 2 et 3, pour sortir plus de fossiles, continuer la fouille de surface, et trouver des restes d’hominine.
Une conférence de restitution sera organisée au village de Xai Xai afin d’informer la population locale, de partager les découvertes et de poursuivre la collaboration (il y a 2 emplois de fouilleurs avec des villageois).
L’équipe d’Homini-karst apportera ses connaissances pour la constitution du dossier d’inscription de Gcwihaba cave au patrimoine mondial de l’UNESCO, dont la candidature est acceptée. Il s’agira du premier site où le guano et la biocorrosion auront une valeur mondiale, car ils constituent la valeur originale et unique de ces cavités parmi tous les autres sites inscrits au patrimoine mondial.

HUMAN ORIGIN BOSTWANA

Communiqué de Véronique Olivier

Du 6 au 22 décembre 2023, Human origine Botswana

L’objectif de la mission, HOB 2023, financée par le CNRS, est de continuer de documenter la présence d’hominines il y a plusieurs millions d’années, dans la région d’Afrique australe, afin de faire le lien avec leur présence en ’Afrique de l’Est, qui concentre actuellement les vestiges. Il s’agit d’explorer des grottes très anciennes qui aurait servi de pièges à sédiments, la brèche. Dans cette brèche, l’equipe de HOB 2023 recherche des fossiles de micro et macrofaune et des vestiges d’australopithèques. Pour mener à bien cette mission, une équipe pluridisciplinaire de 10 individus, spéléologues geoarchéologues et paléontologues est constituée, dont quatre licenciés à la FFS, sous la direction de Laurent Bruxelles karstologue du CNRS, avec la collaboration de l’équipe du Museum d’histoire naturelle de Gaborone, capitale du Botswana. La formation des grottes est également un sujet d’étude ainsi que le guano, les colonies de chauve souris étant abondantes et de grande dimension. il s’agit de consolider les connaissances du processus de fantomisation et de bio corrosion, de répondre aux questions de formation des réseaux labyrinthiques, sans présence d’eau. Un chantier de fouilles a été ouvert aux Koanaka Hills sur le site K1, pour isoler la brèche et l’étudier.

Logistique

Le séjour se déroule en 4×4 aménagé avec des tentes sur le toit, afin de garder de la mobilité entre les différentes zones d’étude, cuisine de campagne et douche solaire sont notre quotidien. Le masque FFP3 sur le visage est requis dans les cavités comportant des colonies de chauve souris. La température est de 25 degrés sous terre jusque 28 degrés. La mission s’est déroulée au début de la saison des pluies, avec des températures élevées, en moyenne 37 ou 38° en journée et des pluies violentes et froides en fin d’après-midi. La biodiversité est foisonnante, des nuées d’insectes ont colonisé notre camps à la suite d’émergence. Cette partie du Kalahari, en partie dévorée par un précédent feu de brousse a reverdi, le temps de notre séjour.

Résultats

Plusieurs prospections ont été menées sur le massif de koanaka et Gcwihaba, et trois désobstructions sont restées à l’état de sondage faute de matériel ou de temps.

La visite de cavités déjà découvertes par les botswanais a permis de documenter les différents sujets d’étude. 100 kg de brèche pour la datation ou l’identification ont été collectées. Ils seront gardés au musée de Gaborone en attendant leur traitement. Les cavités étudiées ont été scannées en 3D afin de reconstituer la stratigraphie des couches de brèche.

Fait insolite

L’évènement majeur de cette expédition et sans contexte la rencontre avec des léopards, et par deux fois sous terre, à Gcwihaba, par deux spéléologues partis en éclaireurs ou pour poser l’équipement de progression, loin dans la cavité. La pose de pièges photographiques et le relevé d’empreintes a permis d’identifier une femelle léopard côté nord et un jeune ou un mâle côté sud. Nos deux spécialistes de la faune carnivore se sont passionnés pour cette occupation car c’est la première fois qu’il est constaté la tanière régulière de léopards à plus de 100 m de l’entrée d’une cavité, en obscurité totale. Des proies ont été traînées et ramenées dans ce qui semble être la salle de petit déjeuner des léopards.

La cohabitation forcée hommes et félins, le temps du relevé topographique en 3D et des fouilles s’est déroulé avec calme et vigilance. Sans étonnement, le boyau d’accès à la tanière n’a pas été scanné :-).

ci dessous:« laurent B. explique la genèse de la brèche fossilifère »

Relation avec les locaux

En fin de séjour, une conférence de presse avec les médias botswanais et la présentation des différents sites, a bien occupé les équipes. Les fouilleurs du muséum ont pu s’initier aux méthodes de progression sur corde, grâce à un acacia aménagé en training Speleo à K1.

Rapport d’expédition

Un rapport sera produit d’ici quelques mois, afin de raconter chaque aspect de cette expédition, riche en échanges et en rencontres, dans des paysages merveilleux d’aridité et d’exubérance et annoncer les perspectives.

Pour en découvrir plus cliquez ci après!

https://hal.science/hal-03920135/file/2022%20-%20Botswana%2C%20en%20qu%C3%AAte%20des%20origines%20-%20CNRS%20Le%20Journal.pdf